Résumé:
Pour explorer les mécanismes passionnels des minorités ethniques, nous nous sommes penché sur le sport le plus populaire au monde, le football, car les passions que celui-ci déchaîne sont exploitées généralement au profit de ferventes contestations socio-identitaires. Certains le considèrent comme une religion à part entière au moment où les autres voient en lui un néo-paganisme exubérant. C’est dans cette ambivalence que nous a plongé le club footballistique du Mouloudia Olympique de Bejaia (MOB), lorsque nous avons essayé d’analyser sémiotiquement les différents symboles que ses supporters ultra s’approprient pour afficher ou réclamer leur appartenance identitaire. L’observation minutieuse des peintures murales qui couvrent les murs des quartiers de la ville à ce sujet nous en disent long. Grâce à une approche interdisciplinaire, englobant la sémiotique, l’anthropologie et la phénoménologie, nous avons constaté que l’interculturalité pouvant enrichir l’expérience minoritaire s’avère impossible à enraciner dans les mentalités des amateurs de cette équipe qui se prennent pour les seuls conservateurs de la culture ancestrale berbère. Or, cette dernière n’est pas une totalité du fait qu’elle emprunte aux autres cultures quelques symboles dits universels. Deux objectifs majeurs sont tracés dans cette étude : le premier consiste à montrer comment la passion footballistique est instrumentalisée au profit de revendications identitaires et mystiques plurimillénaires, le second s’efforce de rappeler que les peintures murales sont des signes vecteurs de sens et de significations multiples tous reliés à la liberté d’expression, source, que l’on sait, sujette constamment à de grandes polémiques.